L’union européenne, implacable bande de djihadistes du néo-libéralisme | Ensemble

Traduit de l’anglais par Mathieu Darge sur le site d’Ensemble (FdG), voici un article de Stathis Kouvelakis, professeur de théorie politique au King’s College de Londres, qui fait partie du comité central de Syriza :

Grèce : l’heure de la rupture | Ensemble.

Extraits :

La peur de la sortie de la Grèce de la zone Euro (Grexit) ne doit plus nous paralyser.

La décision du gouvernement Syriza de transférer la totalité des réserves disponibles du secteur public à la Banque de Grèce marque un tournant politique. (…)

(…)

Le gouvernement grec a été contraint de signer un accord inéquitable (arrêt du principal mécanisme d’approvisionnement en liquidités des banques grecques) sous la pression du retrait accéléré des dépôts des banques et de la menace de leur effondrement.

Maintenant, avec l’épuisement des fonds publics, désormais insuffisants pour assurer à la fois le service de la dette et les obligations incompressibles de l’État, il est évident que le seul temps gagné a été à l’avantage des institutions européennes et que la partie grecque est exposée à l’intensification du chantage tant ses positions se détériorent.

Le climat belliqueux, sans précédent, de la réunion de l’Eurogroupe de Riga, au cours de laquelle le Ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, a été cloué au pilori par ses homologues (y compris ceux de pays pesant d’un aussi faible poids que la Slovaquie et la Slovénie) montre suffisamment clairement de combien d’humiliations le gouvernement grec a eu à souffrir au cours des deux derniers mois.

(…)

La partie grecque n’a pas pris en compte ce qui était évident, dès le début, à savoir que la BCE et l’Union Européenne n’allait pas rester à se tourner les pouces face à un gouvernement de gauche radicale. Dans leur arsenal, l’arme au plus gros calibre est le contrôle des liquidités, et il était totalement prévisible et logique qu’ils s’en servent immédiatement. Et, naturellement, les créanciers ont toutes les raisons de continuer à « serrer le nœud » (l’expression est d’Alexis Tsipras) jusqu’à ce qu’ils aient contraint la Grèce à une capitulation totale.

(…)

Avec la méthode et le contenu de la décision sur le transfert des fonds, i.e. par décret ministériel, le gouvernement (…) pourrait bien avoir créé les conditions, pour des « cacerolazos » à la grecque, ces formes de protestations utilisées par les forces réactionnaires et les oppositions soutenues de l’étranger dans les pays d’Amérique Latine qui tentent de renverser les gouvernements de gauche.

(…)

C’est le moment précis de tenir un discours clair, le seul qui peut avoir un impact et mobiliser le peuple, précisément parce qu’il le traite avec respect, en adulte, agent de son propre destin.

Poursuivre la lecture de « L’union européenne, implacable bande de djihadistes du néo-libéralisme | Ensemble »

Commission Européenne on ICE


T’en souviens-tu ami, dans 3 semaines, ce sont les élections Européennes. (Et également la nouvelle élection présidentielle en Ukraine, mais ça, ce n’est pas mon sujet du jour.) Je souhaiterais donc t’entretenir, modérément, d’Europe, ou plutôt d’Union Européenne, celle de Barroso et Merkel. Je sais qu’il est totalement démodé de nos jours de s’intéresser aux programmes politiques avant que de déposer son bulletin de vote et je ne profiterai donc pas de ta vigilante bienveillance à on égard pour t’infliger l’analyse par le menu de ce programme.

Mais au moins, pourrions-nous examiner ensemble où nous en sommes rendu. Qu’en dis-tu ? Si tu es un lecteur assidu du Monde, de Libé, du Figaro, du Parisien, du Nobs, du Point, de l’Express ou de la PQR, ou si tu écoutes ne serait-ce que 10 minutes par jour la Radio ou la Télévision française, tu pourrais, ami, ne pas être entièrement au courant (mais la faute ne t’en revient pas exclusivement, rassure-toi) du bilan que beaucoup de gens, pas forcément tous idiots (bon, probablement moins brillants que Jean Quatremer 😀 mais quand même) tirent de la construction européenne actuelle. Parmi beaucoup d’autres, prenons par exemple Messieurs Michel Soudais et Denis Sieffert du journal Politis (oui, oui, c’est un hebdomadaire d’actualités, promis). Et bien, dans le numéro 1300 du journal,  ils démontent lumineusement les 5 mensonges qui nous sont perpétuellement (et vigoureusement) assénés concernant l’Europe (un peu à la manière dont les économistes atterrés démontent les 10 fausses évidences ou mythes sur l’économie de la pensée unique dans leur manifeste éponyme bien connu) :

  1. Mensonge 1 : un modèle de démocratie
  2. Mensonge 2 : une garantie de paix entre les peuples
  3. Mensonge 3 : l’assurance de la convergence sociale
  4. Mensonge 4 : plus de protection pour ses citoyens
  5. Mensonge 5 : une grande puissance politique et diplomatique internationale

Ami, si tes moyens te le permettent, abonne-toi (si ce n’est déjà fait) et lis par toi-même. Pour ma part, je me contenterai aujourd’hui d’illustrer le mensonge n°1 avec un exemple, à la limite de la caricature, de ce qu’est la Démocratie pour nos bâtisseurs européens.

Peut-être as-tu souvenir que je t’exposasse ici même il y a deux ans l’escroquerie que ces tartuffes venaient d’inventer pour tenter de se faire passer pour des gens tout à fait soucieux des aspirations du bas peuple (ce qui est malheureusement un peu un exercice obligé quand on se dit démo-crate finalement). Il s’agissait de l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) introduite dans le régement européen par le Traité de Lisbonne (fallait bien un gadget pseudo-démocratique dans ce texte pour tenter de faire oublier qu’il était l’émanation-même de la négation de la volonté populaire) et lancée très officiellement le … 1er avril 2012 (une sorte de clin d’œil frondeur à l’Histoire).

Bien sûr, à l’époque, Poursuivre la lecture de « Commission Européenne on ICE »

Des nouvelles de … la Grèce … entre autres


Encore un petit billet sur l’international, désolé.

Ça y est. La Crimée a fait son referendum. Un referendum constitutionnellement tout à fait illégal, au moins aussi illégal que le nouveau gouvernement d’Ukraine (qui n’est nazi qu’à 20%-25% [1], ouf, rien de grave donc), ou que la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo en 2008 par exemple, ou que l’occupation expansionniste d’Israël en Palestine, ou évidemment, que l’ensemble des interventions et ingérences étasuniennes de par le monde durant ces 70 dernières années. Que va-t-il se passer maintenant ? Escalade belliciste avec sanctions économiques de « l’Empire du Bien » et contre sanctions de « l’Empire du Mal » (n’oublions pas en effet que s’il y a des FDI, investissements directs étrangers, russes aux USA ou en UE, il y en a également énormément des occidentaux en Russie, tiens je pense soudainement aux titres de dette souveraine en dollars ou en euros détenus par la Russie), accélération du processus de signature du Traité de libre-échange entre UE et Ukraine, balkanisation du pays ? Ah, si seulement l’UE avait accepté en novembre 2013, la demande de la Russie de les inclure dans une négociation tripartite sur les accords de libre-échange de l’Ukraine avec ses voisins au lieu de suivre les va-t-en-guerre OTANiens en soutien des surexcités de Maïdan.

Une chose est sûre. Les médias, perpétuellement à la recherche de sang frais, quitteront bientôt la place Maïdan et la Crimée (qui parle encore de la Syrie?).  Le chef du régime étasunien a réussi à foutre le bordel aux portes de son rival de toujours. Le tsar russe a réussi (ou va réussir) à récupérer la Crimée. L’extrême droite a réussi une nouvelle percée sur la scène « démocratique » européenne. Reste sur le carreau le peuple ukrainien dépossédé de sa légitime révolution. Le peuple ? Pfff, pas assez photogénique. Sauf quand il est en colère comme sur Maïdan ou Tahrir. Le rouge lui va si bien. Le rouge qu’il verse bien sûr, pas le rouge qu’il arbore. La presse aux ordres va maintenant pouvoir se concentrer de manière plus méthodique sur la nouvelle assignation du régime étasunien, la prochaine cible de la pensée officielle, le Venezuela bien sûr. La droite anti-démocratique vénézuélienne ne peut en effet compter que sur un tir de barrage nourri (façon pluie de bombes à la Curtis LeMay) des médias « occidentaux » pour espérer pouvoir reprendre illégalement le pouvoir (faut les comprendre aussi, 18 élections perdues et un coup d’état foiré, ‘sont un peu démoralisé les Kapriles, López et autre Machado). Pour arriver à se ré-accaparer le pouvoir et les richesses du pays sans attendre les prochaines élections, ils ont besoin de leurs brigades internationales de désinformation au meilleur de leur forme et de tout le vocabulaire de la manipulation quotidienne de l’AFP et Reuters (vous savez à base de « manifestation pacifique », « intensification du mouvement », « raz-le-bol populaire », « répression policière », « dictature », « régime totalitaire »), et pour ce qui nous concerne plus directement, de nos plus brillants artilleurs de la démocratie à vitesse variable, les Christophe Barbier, Jean-Pierre Elkabbach, Jean-Michel Aphatie, Nicolas Domenach, Renaud Dély, Yves Thréard, Jean Quatremer, Laurent Joffrin, Daniel Cohn-Bendit, Claire Chazal et Laurent Delahousse, j’en passe et des meilleurs. Aux abris [2], le pilonnage va commencer.

Mais je me laisse emporter … Le but de ce billet était juste en fait de vous faire part d’une petite info concernant … la Grèce. Poursuivre la lecture de « Des nouvelles de … la Grèce … entre autres »

Quelques anticipations sur le TTIP (le grand marché transatlantique)


En cette grisâtre veille de fête des morts, je me devais de lire quelque chose d’adapté.  Quelque chose de bien déprimant et de bien révoltant, vous voyez le genre.  Mon choix s’est donc porté tout naturellement sur un rapport économique étasunien, émanant du Economic Policy Institute, concernant les attaques législatives du régime étasunien sur le monde du travail aux États-Unis.

Pourquoi ce rapport concernant le travail aux États-Unis est-il intéressant, à mon avis, pour nous autres pauvres européens?  Parce qu’il préfigure ce qui nous attend.  S’instruire sur les conditions économiques et sociales aux US, c’est malheureusement un peu comme lire dans le marc de café concernant nos propres futures conditions.  Depuis l’avènement du capitalisme débridé, le régime étasunien constitue en effet le laboratoire lugubre où se concoctent les pires recettes qui sont ensuite exportées sur toute la planète, y compris sur notre vieux continent.  Cela me rappelle d’ailleurs quelques camarades étudiants, il y a bien des lustres de cela, qui déjà à l’époque répétaient sans cesse, des étoiles (environ une cinquantaine) plein les yeux, des bandes (environ une grosse douzaine) sur leur R8 gordini, à propos de tout et n’importe quoi: « putaingue (cela se passait à Marseille ;-)), on a au moins vingt ans de retard sur les ricaingues ici, mais tu verras, ça finira par arriver chez nous aussi ».

Le rapport, pour en revenir à lui, fournit une étude détaillée de toutes les lois, votées sur 2011-2012 à travers tous les états étasuniens, qui attaquent, portent atteinte, restreignent ou abrogent les standards, les protections et les acquis des travailleurs dans ce pays de damnés de la terre:

Je sais que Poursuivre la lecture de « Quelques anticipations sur le TTIP (le grand marché transatlantique) »

Les exigences de l’Empire, An III


TITRE III – PACTE BUDGÉTAIRE – ARTICLE 3 – PARAGRAPHE 1 e/
Ce mécanisme [mécanisme de correction, NDLR] comporte l’obligation pour la partie contractante concernée de mettre en œuvre des mesures visant à corriger ces écarts sur une période déterminée.

TITRE III – PACTE BUDGÉTAIRE – ARTICLE 3 – PARAGRAPHE 2
Les parties contractantes mettent en place, au niveau national, le mécanisme de correction visé au paragraphe 1, point e), sur la base de principes communs proposés par la Commission européenne et concernant en particulier la nature, l’ampleur et le calendrier des mesures correctives à mettre en œuvre

TITRE III – PACTE BUDGÉTAIRE – ARTICLE 8 – PARAGRAPHE 1
La Commission européenne est invitée à présenter en temps utile aux parties contractantes un rapport concernant les dispositions adoptées par chacune d’entre elles conformément à l’article 3, paragraphe 2. Si, après avoir donné à la partie contractante concernée la possibilité de présenter ses observations, la Commission européenne conclut dans son rapport que ladite partie contractante n’a pas respecté l’article 3, paragraphe 2, la Cour de justice de l’Union européenne sera saisie de la question par une ou plusieurs parties contractantes.

En d’autres termes (moins abscons):

Si un pays (une partie contractante que ça s’appelle) n’est pas dans les clous (du pacte budgétaire), il a alors l’obligation de mettre en œuvre les mesures précises (très précises même puisque sont indiquées nature, ampleur et calendrier) que la Commission Européenne lui proposent sinon la Cour de Justice de l’Union Européenne sera saisie.

Bon, maintenant, vous appelez ça un peu comme vous voulez, mais pour ma part, quand on est obligé de faire quelque chose, ben, j’ai plutôt tendance à quand même appeler ça une … obligation … ou une exigence …  ou un diktat.  Je déconne là ou bien?  Ah oui, au fait, les articles que je viens de citer sont dans le Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance de l’Union Européenne, le fameux TSCG contre lequel je vous ai si souvent mis en garde.

Je dis ça parce que depuis deux jours, j’assiste, médusé, à une véritable déferlante de simulation de rébellion exaltée contre la Commission Européenne au motif que cette dernière a eu, tenez-vous bien, l’outrecuidance de réclamer des réformes immédiates de la part de Paris et notamment sur son système de retraites.

« La Commission Européenne n’a pas à dicter à la France ce qu’elle a à faire »

a par exemple déclaré le président français, François Hollande, ce mercredi à Rodez.  Et c’est à qui donne l’image du gars le plus remonté, le plus indigné.  Tous s’y sont collés.  Gouvernement et « opposition ».  Tiens, Bayrou par exemple qui déclare « Quand François Hollande dit que ce n’est pas à la Commission de nous dicter ce que nous devons faire, il a raison. »  Et Claude Bartolone ce matin chez Bourdin.  Z’avez vu ça?  Tout rouge (si je peux me permettre pour un socialiste) qu’il était Monsieur Claude (@9’40 ») quand il éructe 😉 à l’adresse de la Commission Européenne:

«Qu’ils se taisent et qu’ils fassent leur boulot!»

Comme s’ils découvraient les choses de la vie.

Ils ont l’air tellement sincères.  On aurait presque envie de les consoler.  Ou alors, ils le sont vraiment, sincères.  Peut-être croient-ils réellement ce qu’ils racontent!  Peut-être sont-ils persuadés que la Commission Européenne n’a pas à dicter ses exigences aux pays de l’UE.  C’est surement ça!  Un tour de bocal, et hop, ils ont oublié qu’ils ont voté cet abandon de souveraineté au parlement européen il y a quelques mois.  Ou alors, ils n’ont pas oublié mais ils n’avaient tout simplement pas tout compris à ce qu’ils signaient à l’époque.  Sont-ils fourbes, amnésiques ou simplement niais?  Quelle question troublante.  Je pencherais pour un savant mélange des trois, dans des proportions différentes suivant les individus (typiquement, un Hollande possède clairement une prédominance du troisième ingrédient alors que pour un Bartolone, le mélange semble plus subtil).

Car enfin, Poursuivre la lecture de « Les exigences de l’Empire, An III »