Le prestige de Hollande


Comme prévu, François Hollande est satisfait après le sommet Européen de Bruxelles d’hier.

Pourquoi dis-je, sournoisement, « comme prévu » ?

Et bien, votre bonne foi légendaire vous forcera à reconnaitre que, avant même l’élection de notre nouveau président, le scénario du film était éventé.  Je vous en parlais par exemple dans ce billet du 4 mai ou, plus récemment, dans celui-ci du 23 mai.  Le bon président français gagne ses gallons de négociateur en chef en arrachant de haute lutte un pacte de croissance à l’intransigeante Angela, et voici le doux peuple français, totalement enamouré pour ce héros de la gauche inflexible, qui accepte sans plus rechigner, les bonnes potions mortifères préparées avec patience et méticulosité par le sorcier Merkozy et sa Main Invisible.

Bien.  Regardons ce que contient ce pacte de croissance que, semble-t-il, nos Pieds nickelés de l’Europe, Merkel, Barroso et Von Rumpuy, feignent d’avoir eu tant de mal à accepter.  Et, je vous prierai de ne pas vous éclater de rire.  Un peu de respect.  C’est vrai, quoi, notre bon président s’est donné beaucoup de mal, tout de même.  François Hollande, avec ses petits bras musclés, aurait donc réussi l’incroyable, l’inimaginable.  Il a obtenu:

  • 0.8% du PIB de l’Europe, soit 120 milliards d’euros, pour relancer l’économie et l’emploi
  • et une …. Taxe Arlésienne sur les Transactions financières pour dans … encore quelques mois … promis.

Je passe rapidement sur le deuxième point pour ne pas accabler de ridicule notre bon président si volontaire.

Et je reviens sur le premier. Car toute la dextérité du tour est là.  En effet, comme l’ont fort bien décryptés (ah, pour une fois, le mot prend tout son sens, je trouve) Thomas Coutrot, co-président d’ATTAC, et Pierre Khalfa, co-président de la Fondation Copernic:

« Ces fameux 120 milliards consistent pour moitié en un « redéploiement » de fonds structurels soi-disant « dormants », mais qui en réalité étaient bel et bien déjà programmés pour être dépensés d’ici 2014.  Quant aux nouveaux prêts que la Banque européenne d’investissement pourra, peut-être, consentir au secteur privé pour des « grands projets » grâce à l’augmentation de son capital et aux project bonds, ils seront étalés sur plusieurs années et l’impact en sera donc très limité. »

Ce « Pacte de croissance » n’aura donc aucun impact sur … la croissance.  Il s’agit pour l’essentiel non pas d’ un plan de relance mais d’une opération de communication politique, le premier volet du fameux pacte faustien dont je parlais il y a presque 2 mois.

Quoi ?  J’ai cité des sales gauchistes d’ATTAC et de la fondation Copernic ?  C’est vrai.  Pardon.  Alors, citons Frédérique Cerisier, de BNP Paribas, qui n’est pas vraiment un think tank marxiste (hein Sergio ! ;-)):

« En dépit de toutes ces mesures, qui ne coûtent au final que 10 milliards d’euros, le pacte de croissance n’est pas très substantiel, d’autant qu’il n’est pas vraiment composé de dépenses publiques nouvelles.  Ça ne va pas contrebalancer les effets des politiques de rigueur actuelles. »

Dix milliards d’euros !

Voilà de quoi il s’agit véritablement. 10 milliards pour la croâââssance, à comparer aux 1000 milliards d’euros qui on renfloué les banques européennes au tournant des années 2011-2012 !  Mais de qui se moque-t-on ?  Ah, oui, de nous, pardon.

Nonobstant, notre socialiste en chef s’est félicité des conclusions de la rencontre.  Il considère que le sommet de Bruxelles a permis d’aboutir à la renégociation du pacte budgétaire.  Tout comme il avait dit, z’avez vu ?  Il est fort hein ?!  Donc, faut l’écouter maintenant, braves gens !  C’est lui le nouveau roi.  C’est lui, maintenant, qui sauve le monde, l’Europe, l’euro et les indiens Caripuna, tant qu’on y est.  Et hop, on enchaîne, vite fait, ni vu, ni connu … On peut maintenant ratifier le pacte de stabilité budgétaire, le fameux traité de soumission TSCG.  N’a-t-il pas obtenu ce qu’il avait promis ?  N’a-t-il pas renégocié avec succès ce pacte par trop austéritaire ?  Bien sûr que si, ma bonne dame !  Par conséquent:

« Je proposerai que soient soumises au Parlement toutes les décisions concernant l’Europe : le pacte de croissance, la supervision bancaire si c’est nécessaire, la taxe sur les transactions financières et le pacte budgétaire« , a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse qui s’est tenue à Bruxelles vendredi.

Et voilà, ça passe comme qui rigole.

Je vais donc reformuler: « Je proposerai que soit soumis au Parlement le pacte budgétaire« .  C’est plus clair, là ?  Référendum, débat démocratique, souveraineté du peuple, indépendance budgétaire de la France ?  Après vous avoir négocié un pacte de croissance aux p’tits oignons de la folie qui tue, rien que pour vous, bandes de petits veinards, vous n’allez quand même pas encore venir m’emmerder avec des détails anachroniques !

Et pourtant, ce n’est qu’un tour de magie.  La preuve ?  Le parlement allemand a approuvé à Berlin le pacte budgétaire le jour même où François Hollande prétendait le renégocier à Bruxelles.  Et à à une large majorité, qui plus est.  Avec l’appui de pratiquement tous les sociaux démocrates allemands, les amis de Hollande !  Le parlement français n’a plus qu’à suivre.  Socialistes ou umpistes, même combat.

Et pourtant, ce n’est qu’un tour.

Et le prestige de ce tour arrive.

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